Le Cercle Brisé

Emma a trois ans quand elle est arrachée par son père, riche et célèbre musicien de rock vivant à Los Angeles, aux bas-fonds de Londres ainsi qu’aux mauvais traitements d’une mère alcoolique et droguée. Alors que la vie paraît enfin sourire à la petite Emma, c’est le drame : elle assiste, impuissante, au meurtre de Darren, son demi-frère de deux ans. Sous le choc, Emma enfouit au plus profond de sa mémoire le souvenir du visage du ravisseur, tandis que grandit en elle un terrible sentiment de culpabilité : elle n’a pas su protéger son petit frère adoré. D’autant que, malgré une longue enquête, le meurtrier n’a jamais été retrouvé. Adulte, Emma devient une photographe célèbre. Mais la petite fille en elle n’a jamais oublié le drame. L’image imprécise du meurtrier hante ses cauchemars. Pour vivre enfin en paix, Emma va devoir le démasquer. Mais pour y parvenir, il lui faudra provoquer un scandale retentissant, et mettre en danger sa propre vie…

En bas, la maison est remplie d’invités, les Beatles jaillissent des hauts parleurs, l’alcool coule à flot et la drogue circule comme des bonbons entre les mains d’enfants.

A l’étage, Emma s’éveille, et parmi le ramdam de cette soirée, entend les pleurs de Darren. La lumière est éteinte, le couloir plongé dans le noir, et la porte de la chambre de son petit frère est fermée, tout ceci est anormal car jamais ses parents, connaissant ses peurs, n’auraient agit ainsi. Prenant sur elle, et refoulant les monstres tapis dans l’ombre que la fillette de 6 ans pense voir, elle longe le corridor et ouvre la porte. Un homme tient son frère, l’empêchant de sa main de hurler, l’autre tient une seringue. Prise de panique Emma s’enfuit mais poursuivie par un des ravisseurs, tombe dans les escaliers.

Elle connait l’assassin de son petit frère Darren, mais le choc de cette vision et l’hospitalisation suite à sa chute, ont traumatisé la fillette, emprisonnant au plus profond de son subconscient le visage du meurtrier. Elle rêvera souvent de cette soirée mais n’arrivera pas à ouvrir la porte, même en songe, ne pouvant affronter l’atroce réalité de cet instant.

Battue enfant, déchirée par cette mort, Emma n’est pas au bout de ses peines, loin de là, mais toutes ses blessures vont finalement lui permettre d’affronter la terrible vérité, le réel visage du traître.

C’est avec brio que Nora Roberts nous expose comment une expérience blessante peut être occultée par la conscience, permettant de se protéger de ce que cette bouleversante révélation entraînerait dans la vie. Il suffit parfois d’un détail, comme ici pour Emma d’une chanson, en l’occurrence les Beatles, pour revenir en arrière et replonger au cœur de cette nuit sordide mais sans pour autant voir la totalité du cauchemar.

C’est aussi tout l’univers du showbizz de Woodstock où planer semblait commun, banal, aux années 90 synonyme de modernité, de tolérance que nous parcourons avec Emma. Le groupe de son père aussi connu que les Rolling Stones, composé de quatre membres, sont sa seule famille, tous la chérissant, la protégeant aux cours de sa vie. Le strass et les paillettes ne sont pas de mise. C’est une immersion dans la drogue et l’alcool, la déchéance d’un membre du groupe, l’homosexualité tabou pour l’époque d’un autre.

Nora Roberts passe habilement d’un personnage à l’autre, nous exposant les difficultés propres à cette notoriété, montrant le côté sombre que l’argent permet d’acquérir, le tout finement bien tourné et n’interférant pas avec la quête initiale de la découverte de l’assassin du petit Darren, chaque personne, chaque époque ayant au final un but en soit.

Un roman bien tourné, déchirant, où le suspense ne trouvera son déclin qu’en toute fin. Une histoire bouleversante d’une fillette devenue femme mais qui devra affronter malgré son milieu social aisé bien des détresses pour accéder au bonheur et à la paix de l’âme.